MANIFESTATIONS

La poésie brésilienne on live


Un parcours bilingue dans la poésie contemporaine brésilienne


le samedi 5 novembre 2022, à 15h30

Avec
Inês Oseki-Dépré, Angélica Freitas

© DR



Dix ans après la belle anthologie publiée chez Le Cormier (Belgique), La poésie brésilienne aujourd’hui et cinq ans après l’anthologie organisée et traduite par Patrick Quillier, Retendre la corde vocale - Anthologie de la poésie brésilienne vivante (2016, Le Temps des Cerises), nous proposons aux lecteurs une nouvelle anthologie de la poésie brésilienne, réunissant cette fois une trentaine de poètes, allant du plus célèbre à la plus jeune et prometteuse. Or, tout en étant une anthologie à prétention contemporaine, on présente des poètes déjà disparus, mais dont le rayonnement, la portée de leurs innovations, la nouveauté de leurs textes continuent de traverser la contemporanéité, de servir de modèle, si l’on peut dire, ou d’anti-modèle, en un mot, de référence aux nouvelles générations.
On s’y trouve en présence de formes très variées allant d’un travail formel extrêmement élaboré visant à saisir le détail : "Un couteau seule la lame », de João Cabral, qui, par métonymie est lourd de sens ; les poèmes visuels d’Augusto de Campos, jusqu’aux textes à connotation sociale : Diana Junkes : asas plumas macramé : « la misère exposée à la gangrène attire des mouches/ même sous le bleu du ciel » ; Horácio Costa : Kali, Huizilopochtili : « au rythme de la mitraille qui l’assourdit et symbolise la défiguration du corps historique/du peuple… » ; Régis Bonvicino : Après-midi : « il n’a plus rien, il n’a pas de spleen/ il n’a que des coups de bâton » ; Antonio Moura : Afrique : « Écrire rien, écrire nègre, nègre sur nègre… » où, sous forme elliptique ou au moyen d’anacoluthes, la misère, la corruption, la violence se laissent percevoir. Le rapport à l’histoire transparaît un peu partout.
Il ne s’agit pas non plus d’une poésie amnésique qui aurait fait table rase du passé. Que ce soit par les constructions baroques de certains poèmes (après Haroldo de Campos (1955), pour qui « le baroque moderne répondait aux nécessités morphologiques et culturelles de l’expression artistique contemporaine », chez un Horácio Costa , dont la poésie narrative et polymorphe va à l’encontre du poème bref et concis. La citation ou l’adresse est un autre élément historique de l’auto-référentialité : le poème cite des poètes, contemporains ou étrangers. Baudelaire, surtout l’inventeur du poème en prose, icône de la modernité française, défenseur de l’ironie, du transitif et du contingent, est une constante digérée dans un geste de respect anthropophage (Marcos Siscar, Paula Glenadel, Izabela Leal). Mais aussi Mallarmé, Rimbaud, Apollinaire, ou Pound, William Carlos Williams…

Par rapport à notre traduction, empruntons ces mots d’Haroldo de Campos : « La traduction créative (puisqu’il s’agit de recréer dans une autre langue) – la TRANS-CREATION – est l’organon par excellence de la réappropriation de l’altérité littéraire, de l’inscription de la différence dans le jeu de possibles du code universel ».

Inês Oseki-Dépré


Extrait de la préface à Anthologie internationale de poésie contemporaine – 2. Brésil – Poésie intraitable, éditions Les presses du réel - Al Dante poésie







Angélica Freitas