EXPOSITIONS

Le partage des eaux


Marie Borel (textes) & Jean-Christophe Garcia(photographies)


du samedi 22 mai au samedi 26 juin 2004

textes
Marie Borel

photographies
Jean-Christophe Garcia

Marie Borel
Je ne fais que passer



Présentation :

Cette exposition fait suite à la rencontre lors d’une résidence à Bordeaux de l’écrivain Marie Borel et du photographe Jean-Christophe Garcia. Le résultat de cette rencontre est la production d’une exposition de photographies et la publication aux éditions Le bleu du ciel de deux livres, Trompe-Loup et Le partage des eaux.

Dans les conditions de la résidence, je devais travailler avec un photographe. Son sujet était la frontière. Il n’y a pas eu d’autre proposition de travail donc je suis allée sur son terrain, pour quelqu’un qui ne fait jamais que passer (comme dit Emmanuel Hocquard) cela pouvait être très intéressant.

Je revenais de Palestine et Bordeaux sous tramway ressemblait à une ville dévastée. On utilise les mêmes gros blocs rouges et blancs pour bâtir un check-point que pour construire un tramway. Et en Palestine Cisjordanie dans Naplouse éventrée où j’ai passé douze jours on vit en permanence avec la frontière les check-points la boue la poussière. J’aurais voulu faire un film de guerre. Filmer Bordeaux comme si nous étions à Naplouse. Une guerre abstraite. Mais cela n’a pas été possible. Jean-Christophe Garcia s’intéresse à la frontière plutôt dans le sens de ce qu’il appelle déperdition de l’image, pas de check-point, pas de guerre et pas de film de guerre.
Donc le voir autrement.

Incertitudes, hypothèses, variations de points de vue, divergences d’inter-
prétation, enquêtes d’un type ou d’un autre.

Je me suis intéressée au mot « frontière » d’un point de vue lexical. Le terme de frontière a évolué lentement. Tout s’est joué dans la relation entre frontière et limite. La frontière est une variété particulière de limite et sa caractéristique est qu’elle mérite comme les vaches d’être bien gardée. Limite civile de souveraineté, frontière naturelle, marche, confins, elle est terme, limite, bornes, extrémité, lisière. Le terme est où l’on peut aller dans un double emploi spatial et temporel. Les limites sont ce qu’on ne doit point passer. Les bornes sont ce qui empêchent de passer outre. Le bout (extrémité fin) répond à un autre bout. L’extrémité au centre, la fin au commencement. Confins est assez vague. Borné peut être entendu au figuré. Finis meta terminus.

J’étais à Biarritz avec Florence Delay. Je lui ai parlé de la Garonne et la Dordogne qui se jettent l’une dans l’autre pour faire la Gironde l’estuaire et l’estuaire qui se jette dans la mer, lieu de confluences, l’idée d’un voyage là avec le photographe. Une idée de frontière mouvante indiscernable. Florence a dit : oui, c’est cela l’idée, le partage des eaux.

Après au cours du voyage dans l’estuaire avec le photographe où nous cherchions la ligne de partage des eaux, l’eau douce et l’eau salée sont apparues vite mais pas longtemps et moi j’étais déjà ailleurs lisant le journal de Bordeaux de Jean-Pierre Lefebvre dans le temps que Hölderlin passa dans la région, livre qui donne beaucoup de nouvelles de caravelles brigantins corsaires bricks en route pour les îles des nouvelles de la ville et des marais et du théâtre mais surtout du commerce des épices et des mouvements du port et des bateaux – Bordeaux fut un port de commerce pendant longtemps, j’y ai lu que les poèmes faisant référence au bref séjour de Hölderlin à Bordeaux étaient : Colomb – La moitié de la vie – En souvenir de – Fête de la paix – Le plus proche le mieux.
Alors j’ai choisi l’amiral héros de la sagesse et du courage et des trois-mâts. L’amiral est poète et il finira comme Jean à Patmos dans la grotte de l’écriture au bord d’une mer enfin vraie. Et Fête de la paix puisque quand ces douze strophes sont tombées du ciel contingent de la destinée des manuscrits sur la terre prosaïque de l’édition, elles ont déclenché de grandes guerres. Fête de la paix pour la Palestine en guerre.

En souvenir de pour le vent de nord-est.
Le milieu de la vie pour cette phrase de Juliette Valéry un jour à déjeuner « le partage des eaux c’est le milieu du monde ».
Le plus proche le mieux parce qu’il n’est de doux commerce que le commerce amoureux.
La fiction est la pensée d’une chose impossible comme le mouvement le plus rapide en même temps qu’elle est prise pour le concept d’une chose n’existant jamais.




voir aussi :
Le partage des eaux - Marie Borel (textes) & Jean-Christophe Garcia (photographies) (Manifestations)


lire aussi :
127