CONFéRENCES

Danielle Collobert


le vendredi 2 juin 2006, à 19h

table ronde avec :
Jean Daive, Uccio Esposito-Torrigiani, Martin Melkonian

autour de l'oeuvre de :
Danielle Collobert

carte postale de la rue de La Marne
(où vécut D. Collobert, à Rostrenen)



Danielle Collobert est née le 24 juillet 1940 à Rostrenen (Bretagne). Tout en voyageant continuellement à travers le monde, elle conçoit une oeuvre littéraire majeure. Danielle Collobert s'est suicidée à Paris en 1978.

Présentation :

[…]
Dans le cas de Danielle Collobert, l’entreprise n’est pas moins étrangère à ce que l’oeuvre a d’essentiel, à cela près qu’elle a laissé un journal, et des pages qui évoquent des lieux, des temps traversés — mais, lorsque j’ai ouvert le premier gros carton contenant les archives qu’elle avait laissées, ce gros carton noir, sérieux, presque administratif, je suis restée bouleversée de trouver une carte postale, une vieille carte postale conservée par Danielle Collobert jusqu’à la fin de sa vie, avec une vue de la rue où se trouve sa maison natale. « Rostrenen, rue de la Marne », une vue prise depuis la place du Centre et qui ne montre pas grand-chose, des maisons, une dauphine immatriculée 22, l’enseigne du marchand de couleurs, « Droguerie, parfumerie, parfums Forvil », un cycliste en ombre plongeante, avec un chapeau feutre, et, tout au bout de la rue comme rongée de soleil, une plongée vers rien, les collines, la campagne, la fin de la rue, de la ville, de la vie... « Rostrenen, rue de la Marne ». Je n’avais jamais pensé même à entendre ce nom, cette présence de la guerre au milieu du bourg, et, comme en filigrane, à la naissance de ce bourg sortant de la marne de l’étang proche.
[…]

Françoise Morvan, Toujours lentement le même temps, in ' ' ' Le Cahier du Refuge ' ' ' Danielle Collobert, juin 2006




Extrait :

[...]
en regardant les gosses tout à l'heure dans le square – retrouver des sensations d'enfance – de terre et d'eau – sensation floue – une odeur –
des images éparpillées –
la porte entrouverte de la salle à manger et mon grand-père dans un lit – tourné contre le mur – femmes assises en cercle autour de la table de la cuisine parlant à voix basse – et pleurant – couleurs rouges et roses –
le garçon en bleu – pendu par un crochet au balcon de la maison à l'angle de la place – et les Allemands autour – le crochet – le jardin – l'entrée – la porte avec les massifs de fuchsias rouges – le tas de pommes
sur le jardin –
un soir dans la « maison de derrière », des tartines de mort-aux-rats rose et des cris aigus – la peur
les fleurs de givre sur la fenêtre – et la chaleur des pieds dans le four – les chaussons brûlants – en rentrant de l’école –
les orages et le vent dans les sapins à Campostal – le feu dans la cheminée dans la salle –
énumération d'images alors que ce sont les odeurs qui sont les souvenirs les plus présents – le café grillé – la lessive – les poires trop mûres dans le grenier – odeur de bois et de terre mouillée –
[...]

Danielle Collobert, in Les Cahiers (1956-1978), janvier 1960, collection « Change », Seghers-Laffont, 1983





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