MANIFESTATIONS

Unica Zürn


Lettres à Ruth Henry, 1967-1970


le vendredi 22 septembre 2006, à 19h

présentation par :
Franck Mallet, Ruth Henry

d'une édition privée des correspondances de :
Unica Zürn



Extrait :

Il y a plus de trente ans que ces lettres m’ont été adressées par Unica Zürn entre 1967 et 1970, l’année de sa mort. Elles évoquent l’histoire d’un accomplissement ; celui que représentait pour Unica la publication, avant tout dans sa traduction française, d’une œuvre qu’elle tenait pour la plus essentielle de sa vie : ses livres, L’Homme-Jasmin, grandiose confession de son aventure avec la folie, suivi de Sombre Printemps, bref récit audacieux et réussite littéraire totale d’une femme « reprenant son souffle après la bataille » disais-je dans ma postface ; réconciliation avec l’écriture, avec l’Art, après ces notes d’une maladie mentale arrachées de haute lutte aux abîmes.
Ces lettres jalonnent aussi l’histoire de notre amitié. [...]
Étrange parcours que celui de cette amitié… « C’est ma meilleure amie à Paris » écrira Unica dans une lettre datée de 1970 à l’éditeur de ses anagrammes, les Hexentexte, à Berlin. Tout d’abord, pendant les années cinquante et soixante, nous ne nous voyons que de loin. Toutes deux d’origine allemande, ayant quitté notre pays, une vie antérieure, pour devenir, elle la compagne de Hans Bellmer, moi l’épouse de Maurice Henry. Nous rencontrant à l’occasion de rares événements surréalistes comme tel vernissage à la galerie Cordier ou à la soirée légendaire dédiée au testament de Sade.
C’est en 1966 qu’elle fit appel à mes compétences professionnelles en me proposant la lecture de l’ouvrage qu’elle venait d’achever : Der Mann im Jasmin, afin que je puisse le juger et, selon son souhait, le traduire en vue d’une publication en France.
[...]
Notre amitié s’exaltait au fil de ces années, portée par ses projets que je voulais mener à bien, et avant tout les traductions. Celle de L’Homme-Jasmin, qui, avec la collaboration de l’ami Robert Valançay, demandait beaucoup de temps, puis de Sombre Printemps. Unica, en effet, avec une obstination convaincante, désirait une publication en français plutôt que dans la version originale ; comme si elle soupçonnait le long chemin décourageant qu’il me faudrait poursuivre afin de trouver, après sa mort, un éditeur allemand à cette œuvre singulière, sous-titrée Impressions d’un maladie mentale… — éditeurs renommés ou amis ne parvenant pas à s’engager pour ce texte déroutant, « oscillant entre fiction pure et simple documentation ».
[...]
Dans l’Allemagne d’alors (qui n’était plus celle de Gérard de Nerval), il manquait un chaînon à la juste perception d’un texte comme L’Homme-Jasmin et l’extraordinaire métissage qui caractérise les écrits d’Unica, issus de sa mémoire brûlante et de son imagination jubilatoire, le tout serti par un style quasi métallique à force d’être épuré, sans fioriture aucune, allant de soi. Se pourrait-il que cette lacune soit comblée un jour dans le pays natal d’Unica ?
[...]

Ruth Henry, préface à Lettres à Ruth Henry, Unica Zürn, 2006, in le ' ' ' Cahier du Refuge ' ' ' 149, septembre 2006





Unica Zürn
Lettres à Ruth Henry (1967-1970)
Traduites et préfacées par Ruth Henry
Le Son Lointain
2006




lire aussi :
149


écouter :
Unica Zürn - Lettres à Ruth Henry (extraits)