Opérations de collages et de réécritures

Nous explorons la bibliothèque du centre aéré. Bibliothèque rosechair de poule, récits d’aventure. Nous prélevons des phrases pour les transformer, les actualiser, les « adapter » au contexte du centre. Voici quelques extraits.

On m’a demandé tout ce qui se rapporte à mes aventures au centre. Les événements que je vais conter concernent La Renette depuis quelques années. 

Si vous descendez au bon arrêt du bus, vous serez où se trouve La Renette, près de Dromel et Auchan. 

Les derniers jours de l’hiver s’effeuillent. L’hiver touche à sa fin. Le ciel de Marseille est ensoleillé, l’air est suffocant. Les bruits de la ville s’atténuent. 

Des femmes passent dans la rue du centre pour vendre des pizzas. On entend retentir le gong de Chine.

Voilà le bon poulet rôti ! Le livreur de poulet finit sa journée. 

Il prend son bracelet de l’an de grâce 2021, et se rend au centre où sa sœur y est déjà, à deux ou trois pas du chantier.

Le projet était de faire un élevage dans le sous-sol, après l’escalier aux 99 marches.  Il faisait peur à sa sœur. Une fillette part lire des livres dans la salle des pandas. Son père est un farceur, capable de se déguiser en momie pour mettre la trouille.

Au centre, il y a des activités, des jeux et des histoires. C’est trop bien. 

Un jour, après la vente de charité et le dîner de gala, le feu faisait rage au centre aéré. Des dizaines d’enfants se sont blessés. Les parents des enfants étaient inquiets. Heureusement que nos enfants ne sont pas morts !

Liam et Lisa sont nés le même jour, le 20 septembre 2012, un événement incroyable. 

L’animateur est sans mémoire, mais pas sans imagination. La preuve, l’animateur avait surgi dans le centre de La Renette et parlait à quelqu’un d’invisible. Les enfants suivaient ses gestes et son regard. Certains enfants imaginaient un vieillard sur le toit de La Renette faisant un geste de la main pour ne pas entendre le conte de l’animateur, d’autres regardaient par la fenêtre. A minuit pile, l’animateur mange de la viande de gazelle. 

Un petit dit que c’était trop nul. Oui, répondit une animatrice. Ce n’était pas la première fois qu’une dispute se passait. Sur ces entrefaites, elle devint souffrante, et au bout de sept mois, elle eut un enfant.

La directrice m’a donné des cartes, des crayons de couleur et un tas de jouets. 

  • Tu vas revenir la semaine prochaine ?
  • Oui, je vais m’inscrire au mois de décembre.

Dehors / autour

Nous arpentons l’espace à l’extérieur du centre. Chacun se positionne et note les éléments autour de lui. Puis on se déplace, on longe et on zoome. On recueille des bribes de paysages.

Face à moi il y a

un poteau, un avion blanc, de la fumée qui sort d’un bâtiment, neuf fenêtres dont deux ouvertes, quatre volets verts, un 32 sur un numéro de porte d’entrée, un nichoir bleu et rouge, des pandas qui jouent au béret, un chat noir et blanc, 

un arbre, un caca de pigeon, une voiture rouge et verte, un rocher et un balcon, une Porsche, un chat noir, un chien carlin, un drapeau bleu-blanc-rouge, un thuya, 

un arbre sans feuille, pigeon, du pollen, du froid, une pie

un camion Citroën blanc, un clou rouillé, des buissons, des pandas qui s’affrontent

un pic-vert, une Fiat blanche, un arbre découpé à la tronçonneuse, je me vois en train de congeler et de mourir de froid

deux statues de pigeon, une table de pingpong bleue, une villa, deux fils bleus, des ventilateurs, un traineau de Noël et la guerre des pandas,

des vitres, une dame qui étend le linge, une carte avec un M, une poule qui fait coco, un monsieur qui promène un papi, un chien qui aboie

un olivier qui bouge avec le vent, un cerisier, de l’herbe, un oiseau bleu, une pierre noire

un banc, Auchan, une fleur, des grillages et des lampadaires, un arrosoir, une colline

des escaliers, des nuages, un potager, un portail vert, de la terre, une porte blanche, des poubelles, un chat et ses griffes, un terrain de volley, des pommes de pin, des racines et des toilettes

des buissons verts et jaunes, un arbre en forme de V, des trèfles à trois feuilles et des orties, une canette de 8.6, des w.c.

des cheminées, une directrice et des enfants, une camionnette, des racines et un sapin

un pot de fleurs, des fourmis et des vélos

je me vois en train de m’arracher les yeux, je me vois mort avec des yeux rouges, je vois BZER YO NACR 2044 DEER

N. B. les pandas désignent un groupe d’enfants

Nos objets : rencontres improbables

On entend la voix de Tarkos : « le petit bidon ». Chacun a rapporté un objet fétiche, on parle de ce qu’il est mais surtout de ce qu’il n’est pas. Arrivent des rencontres improbables.

Mini a une robe rouge, un nœud rouge dans les cheveux avec un point blanc. La petite gouttière est rouge avec du pelage noir, je ne peux pas la caresser, elle n’est pas dans ma chambre, elle n’est pas mini. La gouttière et Mini sont amis ils mangent ensemble pour la nouvelle année.

Jaden

Nounours est un doudou qui a des plumes, il parle et chante mais n’a pas d’eau ni de vague.

Jenna

Ma switch est bleue rouge et noir. J’appuie sur des boutons, je peux jouer à des jeux, mais je ne peux la mettre sur un poirier.

Mon bracelet gris et vert, je peux le mettre sur un poirier, je peux le transformer en menotte.

Adam

Mon livre simple comme bonjour avec des personnages : une ville n’a plus de courant, la ville veut que le réparateur répare la panne de courant. Le livre ne peut se tenir sur une patte, il ne peut pas marcher, ni manger de crevettes, ni s’envoler dans le ciel. Madame Flamant rose c’est un doudou, on ne peut pas lui tourner les pages, il ne peut pas être bleu ou vert, il ne peut pas être en panne de courant, on ne peut pas le réparer. Il y a beaucoup d’histoires dans mon livre.

Liana

Mon coquillage a des tâches marron, ça n’est pas un livre, je ne peux pas le lire ni lui tourner la page, il n’a pas d’histoire ni de page ni de couverture, il n’a aucun titre.

Orlane

Ma télé n’est pas un jouet, elle ne marche pas, je ne peux pas dormir dessus, elle n’a pas de cerveau, elle ne peut pas manger, comme mon lit, mais mon lit bouge comme ma télé

Nacim

Le petit lapin et le cerceau

Mon lapin s’appelle Ponpon et a une robe marron, une médaille blanche, de grandes oreilles. Le cerceau est grand et rond. Je ne peux passer à travers le lapin, je ne peux faire du hula hoop avec le lapin. Le cerceau ne peut pas manger des pâtes, il n’a pas de pieds. Le lapin aime le cerceau.

Manon

Mon chien n’est pas un tableau, il mange des croquettes, des oranges avec du chocolat, mais moi je ne peux pas le manger.

Maëline

Le petit ange ne s’envole pas, n’est pas vivant, ne se mange pas mais : il garde mes secrets. Il s’appelle diamant.

Victoria

Lélé l’éléphant n’est pas un lièvre, ni un monstre, ni un journal. Il est doux, calme, il a peur du noir et parle avec moi. Il aime les gâteaux même quand il est malade.

Farah

Le cheval est un héros qui a des griffes, on le traite de bête féroce, il tue tous les méchants qui tuent les gentils, son maitre s’appelle Xavier.

Louis

J’aime mon téléphone et manger des pâtes à la sauce tomate. Mon téléphone, je ne peux pas le manger, je ne peux pas appeler les pâtes.

Maxence

Ma console et le poireau

Ma console s’allume avec un bouton.

Elle n’est pas un poireau, ne se cuit pas, ne se coupe pas. Elle se recharge. Elle ne se fait pas en soupe, je ne la fais pas bouillir.

Ma console que j’aime beaucoup, je ne la mange pas.

Teo

Souvenirs en zigzags

On convoque conjointement des souvenirs du dedans et du dehors. On écoute la voix de Charles Pennequin, dans “un jour”. On parle de souvenirs de paysages, d’actions, et d’émotions.

Imaginez. Comment faire image. C’est comme un diaporama qui défile. Parfois des sensations. Des idées. On verra. 

Ça tombe beaucoup.

Avec Farah, Jenna, Jaden, Louis, Shanna, Orlane, Maëline, Victoria, Liana, Manon, Nolann, Téo, Maxence, Adam, Nacim, Nelson.

Je suis allé dans un hôtel en Espagne, dans une maison en bois, chez mes cousines à Noël, à Burger King avec mon père et ma mère, à Nice.

J’ai installé un programme d’ordinateur sur mon ordinateur n° 2 et j’ai cassé mon ordinateur n° 5.

Une fois, je suis tombée de la falaise et je me suis cassé un bras, je suis tombée de mon lit, mon amie a lancé une balle de tennis sur la télévision, mon tonton est tombé de sa moto, ma maman est tombée au ski.

J’ai vu Micket à Disneyland et un orque à Marineland ; j’ai retrouvé des photos de ma chienne.

Au mariage de mon tonton, j’ai vu un sanglier. J’ai eu 20 à une interrogation sur les tables de multiplication. Ma sœur avait du chocolat dans la bouche, elle a craché, j’ai vomi.

J’ai goûté du saucisson aux olives, j’ai mangé un kébab salade-tomates, j’ai bu du coca, je suis allé à macdo, il y a eu le covid

Au parc, on a vu un hérisson et un écureuil ; à la piscine, on avait des lunettes de plongée.

J’ai vu un flamant rose marcher sur l’eau, des lapins dans une ferme, des coquillages sur une plage en Espagne. Un jour, j’ai retrouvé une photo de lapin.

J’aime pas écrire, j’aime pas lire. J’ai menti à ma mère. Je suis tombé de ma chaise. 

Apprendre le coup de pied retourné. Faire du vélo. Faire le test du Covid. 

J’ai fait de la luge en Ardèche, j’ai pris le bus tout bleu à Toulon, je suis parti en Italie avec ma grand-mère. J’ai lu un livre cool avec du sang. 

J’ai planté des fraises sur mon balcon, j’ai mangé une glace au chocolat, j’ai lu une histoire qui parlait de plusieurs histoires.

J’ai congelé une fourmi, j’ai mangé une fourmi, j’ai tué un lapin, et je suis allé à KFC.

J’ai vu des bébés lapins, je suis montée sur un cheval qui s’appelle chocolat, on a monté les escaliers. J’ai tordu le doigt de mon frère et je suis allée à Aqualand.

Je me suis fait piquer par un moustique tigre, j’ai fait du patin à roulettes au parc Borély, j’ai rencontré Jadène à Royal Kids, je me suis disputée avec ma sœur, j’ai cassé un verre, j’ai mis mon pull rouge préféré, j’ai regardé les étoiles.

Je suis allé au ski, en Normandie, à OK Corral, à Ludiqland, en Corse, à Burger King, à la bibliothèque, au centre aéré

Les hamsters de mon cousin sont morts. Je suis allé au match de l’OM. Je me suis couché à minuit. Je suis tombé.